Pourquoi le sexisme ?

Le Café Psy du 11.01.18

En préambule, je tiens à préciser que je ne pratiquerai pas ce soir l’écriture ou le langage inclusif car que je suis tout aussi progressiste en matière d’égalité des sexes que traditionnelle en ce qui concerne la grammaire. Le masculin l’emportera donc sur le féminin dans les pluriels de ce texte mais ce sera son seul champ de domination ici.

Ceci posé, commençons.

Les hommes naissent dans les choux et les filles dans les roses, dit-on.. Or le choux est plus grand, plus robuste et plus utile que la rose, qui se contente d’être belle, fragile, et de sentir bon.

Voilà jusqu’où va se nicher le sexisme.

Pour aborder ce sujet, il m’a semblé intéressant de consacrer une partie de cette présentation à la constitution de notre identité sexuelle individuelle et une autre partie à la fonction sociale des stéréotypes, des préjugés et des discriminations.

L’inconscient est bisexuel, on le sait depuis Freud. Mais le corps ? Les recherches actuelles en biologie nous indiquent que la « femellité » est l’état spontané de base de tous les embryons. Au commencement sont donc… les filles ! La différenciation intervient avec l’apparition des hormones au troisième mois de grossesse.

Des différences anatomiques

Garçon ou fille, c’est la première caractéristique distinctive du bébé, la première identification attribuée par les parents, dès la naissance, et même avant, parfois, depuis l’invention de l’échographie. Cette identification déclenche des fantasmes chez les parents qui vont émettre des messages conscients et inconscients en direction de l’enfant sur ce que « signifie » être un garçon ou être une fille. Certains avancent même que ces messages priment sur la réalité biologique.

Se savoir « fille » ou « garçon » s’ancre dans la différence anatomique ; mais ce que signifie être une fille ou un garçon se modèle donc à partir des figures parentales puis des schémas proposés par la société. Le regard de l’autre, ce qu’on entend dire de son sexe, du féminin et du masculin, les élans qu’on éprouve, la façon dont ils sont reçus…

Confronté à tous ces messages, certains explicites et nommés, d’autres implicites, l’enfant tente de s’approprier son corps et de l’intègrer dans son imaginaire. Pour cela, il a besoin des adultes. Ce sont eux qui interprètent donnent du sens au corps de l’enfant, dans son aspect et dans ses sensations. Par la suite, c’est sur cette base que l’être humain comprend ce qu’il ressent. Base qui peut être saine, ou pas. Juste, ou pas.

Constitution de l’identité sexuelle

Vers deux ou trois ans, l’enfant découvre que son sexe est différent de celui de l’autre. Plus exactement, l’un en a un, l’autre pas. Car celui de la fille n’est pas visible. Le petit garçon imagine alors très couramment que son sexe peut lui être enlevé ou coupé, et, la petite fille, qu’un pénis pourrait lui pousser ou qu’on lui a retiré celui qu’elle avait. Le pénis est à ce moment-là vu comme un attribut de puissance par identification au père. Il est donc important d’expliquer aux enfants leur vérité anatomique pour éviter l’angoisse dite « de castration » liée à ces fantasmes, la castration étant assimilée à une punition. Les filles auraient donc été punies. Pour les garçons, ce serait seulement un risque.

Par ailleurs, tout au long de l’enfance, l’identité se construit d’abord en miroir avec l’autre, puis dans les attentes de l’autre. C’est à dire que, pour devenir lui-même dans son identité sexuelle, l’enfant s’efforce d’abord de devenir comme l’autre, son parent de même sexe, puis, de répondre à ses attentes pour garder son amour. Mais quel homme, quelle femme sont nos parents ? Comment fonctionne leur couple ? Quelles valeurs défendent-ils ? Quelles réflexions, quels commentaires font-ils devant la télévision, sur la plage, ou ailleurs ? C’est tout cela qui va structurer la façon dont nous habitons notre genre féminin ou masculin et le regard que nous porterons sur l’autre sexe.

Ensuite, cette première identité va se voir rapidement renforcée ou modulée par nos expériences sociales. Ce qui nous amène à la deuxième partie de cette présentation plus en référence à la psychologie sociale.

Stéréotypes, préjugés et discrimination

Notre psychisme a un objectif prioritaire : économiser de l’énergie. Il ne cesse donc de trouver des moyens de se simplifier la vie dans la compréhension de l’environnement. Les psychosociologues appellent ça la « paresse cognitive ».

L’un de ces moyens les plus efficaces est « la catégorisation ». Autrement dit, classer et étiqueter les choses de façon à trouver immédiatement le comportement adéquat. Je vois une chaise. Quelle que soit sa forme, sa taille ou son style, je sais instantanément que je peux m’assoir. Ce qui est vrai pour les chaises l’est pour les humains. Jeunes ou vieux, artiste ou technocrate, hommes ou femmes, etc. Sans connaître grand chose d’une personne, nous la classons immédiatement dans une catégorie chargée de caractérisques spécifiques, les stéréotypes, qui nous indiquent la meilleure façon de l’aborder dans le contexte donné, qu’il soit de coopération ou de compétition. Quitte à préciser et adapter notre jugement par la suite. Cela se passe au delà de notre conscience.

Les stéréotypes trouvent leur origine dans tout ce que j’ai décrit précédemment sur l’environnement dans lequel nous avons grandi.

Donc, nous classons l’humanité en différents groupes, et nous nous autocatégorisons afin de reconnaître nos groupes d’appartenance, ceux dans lesquels nous nous sentons en sécurité. Et cela remonte à la préhistoire.

Mais catégoriser ne signifie pas discriminer. La discrimination se fonde sur les préjugés, qui eux mêmes s’appuient sur les stéréotypes. Ce qui distingue les préjugés des stéréotypes, c’est leur dimension émotionnelle. J’aime, je n’aime pas, j’ai peur, je n’ai pas peur.

Le préjugé a une fonction psychique essentielle. Il protège l’estime de soi.

Je m’explique. L’histoire est faite de relations de domination intergroupes : les blancs sur les noirs, les érudits sur les illettrés, les catholiques sur les hérétiques, etc. C’est vrai pour les grands groupes sociaux jusqu’à l’échelle des nations, comme sur les plus petits dans l’entreprise ou la famille.

Le préjugé justifie et rationnalise la domination ou les privilèges d’un groupe sur un autre. Il efface la culpabilité et la mauvaise image de soi : il ne s’agit plus d’injustice. Si les femmes sont moins intelligentes que les hommes, il est normal de ne pas les encourager dans les études.

Le préjugé a également des effets sur le groupe dominé dans la mesure ou comme, enfant, nous construisions notre identité par identification aux dominants qu’étaient alors nos parents, et nous nous evertuions à répondre à leurs attentes, adultes, nous continuons à nous reconnaître dans l’image que l’on nous renvoie de nous et à correspondre aux attentes des dominants qui nous entourent. Autrement dit, les femmes auront tendance à intégrer l’idée qu’elles sont moins autonomes, moins capables, moins habiles que les hommes et à adopter les comportements de séduction ou de faiblesse que ceux-ci leur prêtent.

Dans l’enfance il s’agissait de garder l’amour des parents, c’est à dire de se préserver inconsciemment de l’abandon et de la mort. Adulte… c’est pareil. Se conformer est toujours moins dangereux que se démarquer.

L’origine du sexisme

Tout cela nous raconte comment le sexisme fonctionne et comment il se perpétue, tant du côté des femmes que des hommes. Mais d’où vient-il ?

La théorie « évolutionniste » se base sur le fait ancestral que les femmes portent et nourrissent les enfants et qu’elles préfèreraient donc des partenaires forts, susceptibles de donner de bons gènes à leur progéniture, et de subvenir efficacement à leurs besoins tant que l’enfant reste dépendant. De leur côté, les hommes faisant face à l’incertitude de leur paternité, ils auraient tendance à dominer les femmes pour contrôler leur sexualité, leur force physique supérieure leur en donnant les moyens.

La culture et l’éducation étant les moyens que l’humain a trouvé pour canaliser ses pulsions archaiques, peut-être tout n’est-il pas perdu ?

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