Contrôle, quand tu nous tiens ! – Introduction

Le Café Psy du 03.11.16

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Les définitions et l’utilisation du mot de contrôle sont multiples et variées. Contrôler, c’est « soumettre quelqu’un ou quelque chose à un contrôle », c’est aussi « dominer ou contenir ses propres réactions ou sentiments », ce que le langage populaire appelle « contrôler ses nerfs ». Avoir ou prendre le contrôle c’est aussi « pouvoir diriger un phénomène, un processus, intervenir dans son évolution » (Larousse). C’est encore, « avoir sous son autorité, sous son pouvoir une collectivité, un ou des individus ». A la table de la notion de contrôle, s’invite donc celle de la maitrise et du pouvoir. En synthèse, nous pouvons considérer que, contrôler c’est donc prendre le pouvoir sur quelque chose ou quelqu’un. Et bien souvent… sur nous-même.

Dans notre vie quotidienne, nous cherchons tous plus ou moins à nous contrôler, qu’il s’agisse de notre image, de notre nourriture, de notre santé, de notre temps. Nous cherchons également parfois, plus ou moins, à prendre le contrôle sur les autres, sur leurs actes, et même sur leurs pensées ou leurs émotions.

Face à la demande de perfection de notre société ou dans l’incertitude affective de certaines relations, nous retenons nos réactions spontanées ou nos émotions. Nous anticipons, planifions, hiérarchisons, nous imposant une discipline d’enfer… Tout cela pour répondre à la quête de ce Saint Graal : un individu totalement maître de sa vie. Ou simplement parce que nous ne savons pas faire autrement !

Le fardeau peut s’avérer lourd à porter et l’objectif inatteignable, au bout d’un chemin en outre aride, voire désertique.

Pourquoi ce besoin ?

Garder la maitrise et prendre le pouvoir, d’accord, mais le pouvoir sur quoi, au juste ?

Nous l’avons dit, le contrôle s’exerce d’abord sur soi, puis sur les autres, et ce à des degrés divers, parfois jusqu’à l’obsessionnel.

Cela prend sa source dans l’enfance, bien sûr, car le besoin de contrôle est, avant tout, lié à notre besoin de sécurité. Autrement dit, il parle de la façon dont nous nous arrangeons avec notre insécurité.

Face à une demande insatiable de réussite ou de perfection, l’enfant s’oblige progressivement à devenir exemplaire, irréprochable. Quelle que soit la demande de ses parents -réussite scolaire, docilité, beauté etc -, il s’évertue à y répondre, croyant l’objectif atteignable et s’accusant lui-même de ne pas y parvenir. Adulte, Anxiété et stress seront très probablement au rendez-vous car pour rendre supportable cette inaptitude à atteindre la perfection attendue, l’enfant, aura développé une capacité de contrôle sur lui qui peut aller jusqu’à l’absolu. Désirs, paroles, nourriture, argent, plaisir… tout ce qui entre et qui sort de lui y passe. La vie émotionnelle et pulsionnelle sera soumise à un profond refoulement. Autant dire que tout risque de générer anxiété, angoisse ou peur sera bordé. Voilà qui laisse peu de place à l’inattendu. C’est à dire à la vie.

De même, l’enfant élevé dans un univers instable, où ses besoins affectifs et sa protection ne sont pas suffisamment assurés, développe tout un ensemble de comportements visant à assurer seul la sécurité qui lui manque. A terme, planification, organisation et même parfois comportements manipulatoires deviendront presque indispensables pour assumer même le simple quotidien . Tout imprévu, toute surprise, si bonne soit-elle, revient à prendre le risque d’une surcharge émotionnelle proche de l’angoisse.

Contrôle sur les autres

C’est pourquoi se contrôler soi-même peut s’accompagner d’une recherche de contrôle sur les autres. Enfin,certains enfants sont englués dans une relation fusionnelle avec l’un de leur parents, sans aucun espace d’autonomie. Sous quelle que forme que soit, il s’agit de relations dites abusives. Pour protéger ce parent qui a tant besoin de lui, l’enfant refoule, dès son plus jeune âge, et parfois jusqu’à la coupure totale, les émotions désagréables et les pulsions agressives. Il contrôle son corps, ses désirs -d’autonomie, notamment-, et tout signe de plaisir. Ceci à la fois pour ne pas déstabiliser son parent mais aussi dans un mouvement inconscient de protection de son identité. En grandissant, il lui faudra instaurer un contrôle sur son environnement, sur ses interactions, sur ses relations. Le pouvoir sur l’autre lui évitera d’une part, de se retrouver débordé par ses émotions, et d’autre part, de voir démasquée cette fragile identité qu’il vit comme culpabilisante.

Et comme nous reproduisons bien souvent ce que nous avons vécu, il pourra devenir lui-même intrusif ou autoritaire, ou, au contraire, montrer un pseudo-altruisme, à l’instar de ce qu’il a vécu enfant, dans la poursuite de ses propres besoins de sécurité. C’est ainsi que nous rencontrons parfois des adeptes du sacrifice, dont la motivation inconsciente est de créer un fort sentiment de culpabilité et de redevabilité chez l’autre. Quoi de mieux pour assurer un contrôle efficace !

Bien entendu, ces descriptions restent caricaturales et incomplètes. Mais elles disent bien la recherche d’un bouclier contre ces sensations et émotions désagréables qui pourraient nous envahir, nous faire exploser, ou pire, nous entraîner dans des comportements irrationnels, dangereux pour notre équilibre ou pour notre image.

Comment en sortir ?

Alors comment se dégager de cette hyper-vigilance à soi ou de ces penchants manipulatoires ? Et en premier lieu, pourquoi lâcher le contrôle s’il nous sécurise ? Parce que cela coupe tout lien véritable, toute intimité avec l’autre. Et surtout, parce que ça épuise ! Nous entretenons un état de tension physique et psychique qui peut finir par entraîner des pathologies plus ou moins sévères.

Mais lâcher prise, ça ne se décrète pas. Nous ne parlons pas ici de ce lâcher-prise très présent dans l’air du temps, qui nous enjoint à accueillir l’instant présent sans autocensure, à accepter les émotions sans crainte, à penser sans préjuger et à accepter ce qui ne peut être changé. Tout cela est très joli, mais bien loin de nos réalités. Et on se demande même s’il n’y aurait pas là une nouvelle forme de contrôle de soi…

Non, nous parlons d’un lâcher prise qui passe par une préoccupation plus saine de notre sécurité intérieure, par une restauration de l’estime de soi, et une moindre peur des autres. Contrôle et sécurité entretiennent une relation fusionnelle. Alors lâcher l’un, c’est travailler l’autre. Trouver en nous les ressources nécessaires à assurer seul notre sentiment de sécurité et ce, avec nos pulsions, nos désirs, notre possible liberté.

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